Adolescence : ne baissez pas les bras !
L'adolescence d'un autiste est peut-être la plus dure période que nous ayons à subir, mais surtout accrochez-vous !
Bien souvent, les autistes passent un cap très difficile à l'adolescence : leur corps grandit alors que leur esprit reste dans l'enfance, ils ont des sensations nouvelles, des besoins nouveaux, sexuels notamment, ils ont du mal à comprendre pourquoi le regard des gens sur eux a changé. A 10 ans, il passait pour encore pour un enfant mignon à qui on pouvait pardonner quelque incartade, à l'adolescence, on le voit désormais comme un jeune adulte et la tolérance de la société à son égard n'existe plus. Certaines démonstrations de force en public peuvent affoler et apeurer les gens, alors que ses crises d'enfant pouvaient encore passer pour des caprices.
Les difficultés relationnelles de l'adolescence présentent des problématiques différentes du passé, comme par exemple : l'attirance pour les jeunes filles ou jeunes hommes, l'intérêt accentué d'aller vers les autres ou au contraire la peur de les croiser, les civilités inhérentes à l'entrée du monde adulte, lui paraissent illogiques, ainsi les autres le considèrent-ils comme mal élevé.
Pour les adolescents qui sont restés de grands enfants, il est difficile de leur faire comprendre qu'ils ne peuvent plus grimper sur le toboggan ou voler la balançoire à la petite fille.
L'imagination se développe également avec l'âge et les expériences ; ainsi votre ado peut comprendre comment fuguer de la maison – les autistes lorsqu'ils ont une idée fixe en tête, ont de la peine à comprendre qu'ils ne peuvent pas l'obtenir tout de suite. Ainsi par exemple s'il a décidé d'aller dans la ville la plus proche, il peut y aller à pied, sans se rendre compte qu'elle est à trente kilomètres et qu'il est deux heures du matin. - et vous risquez de voir votre autiste se voir ramener entre deux gendarmes.
Avec l'âge, la force physique se développe et les crises deviennent un vrai casse-tête à gérer pour les parents. S'ils pouvaient encore gérer un jeune garçon en l'attrappant à bras le corps, il en va tout autrement d'un adolescent d'1m80 pour 70 kilos. Il est important de protéger votre adolescent et vous-mêmes de ses crises de rage ; car il peut tout démolir dans la maison.
Beaucoup de parents se trouvent désarmés physiquement et moralement face à cette rage incontrôlable. Les coups reçus sont parfois d'une telle violence qu'ils développent en nous une sorte d'hystérie qu'il est bien difficile de contrôler. Parfois des ripostes physiques partent sans le vouloir, les parents développent une crainte face à leur enfant que celui-ci interprète comme un relachement, ce qui déclenche une nouvelle crise.
C'est ainsi que certains parents se sont enfuis de chez eux, laissant l'enfant livré à lui-même. Les bruits des crises qu'il faut gérer ameutent les voisins qui téléphonent à la police, votre enfant vous est enlevé et vous pouvez même vous retrouver condamné pour coups et blessures ou maltraitance. Si votre adolescent se blesse gravement, vous devrez vous rendre à l'hôpital où la suspicion à votre égard peut se transformer une fois de plus en dénonciation aux services sociaux. Tous ces désagréments, ces peurs, ces tensions, ce stress, ce harcèlement, peuvent conduire les parents au suicide, et hélas beaucoup sont passés à l'acte.
Bien entendu, inutile de compter sur qui que ce soit pour garder votre „enfant“, il fait bien trop peur. Par contre vous avez droit aux conseils avisés tels que : « vous devriez le confier à un centre », ou « il existe des spécialistes pour ces enfants-là », « ce n'est pas de notre compétence de s'occuper des malades mentaux ». En attendant, c'est vous qui assumez toute la charge de cet adolescent dont vous avez déjà su gérer toute l'enfance. Vous arrivez au seuil de sa vie d'adulte et votre vieillesse avec une charge plus lourde encore à porter : après être passés par la case « espoir », par le chemin « investissement personnel », après le ring des « combats contre l'administration », après dix ou quinze ans de luttes quotidiennes, vous arrivez fatigués, démoralisés, fatalistes, devant un adolescent qui vous réclame toute l'énergie, l'imagination, la force morale, la patience, et l'amour dont vous ne disposez plus que de quelques échantillons.
Alors qu'arrive-t-il ?
Epuisé, vos décisions ne vous appartiennent plus. Les psychiatres ne comprennent pas votre exténuement, ils mettent en avant le bien-être de l'enfant en oubliant que c'est vous qui êtes à la base de ce bien-être. Face à leurs discours, mi-rassurants, mi-culpabilisants, vous êtes tentés de leur laisser votre enfant. Cela m'est arrivé, j'ai heureusement réussi à rétablir ma raison avant que mon fils ne soit interné en hôpital psychiatrique. Les quelques jours que j'ai vécu en allant le trouver chaque jour dans cette chambre aux meubles cloués au sol et aux murs, aux fenêtres sans teint, à la porte close, m'ont ouvert l'esprit et j'ai retrouvé le courage et l'espoir. Aujourd'hui mon fils est à nouveau avec moi. Si j'ai pu passer le cap, ce n'est pas le cas de certains parents à qui les psychiatres renvoient leur enfant à la maison en leur disant qu'il n'y a pas de place pour eux dans les centres ou les hôpitaux. Ceux qui ne tiennent pas en arrivent à tuer leurs enfants et à se suicider dans le même temps. D'autres abusent des neuroleptiques juste pour être tranquilles quelques heures de plus.
Le message que je vous transmets à vous qui en êtes arrivés à ce stade de désespoir, accrochez-vous ! Bien sûr, je sais ô combien c'est facile à dire, mais je suis passé par là alors je sais qu'on peut y arriver.
Les solutions existent, mais seul on ne peut pas faire grand-chose. Nous ne sommes que des humains faillibles. Aussi je ne suis pas là pour juger ceux qui ont fauté, mais pour encourager et soutenir ceux qui essaient encore et toujours d'avancer malgré le lourd fardeau qu'ils portent.
Les neuroleptiques sont une fausse solution ; pour le cas de mon fils ça n'a fait qu'empirer la situation, avant que le risperdal ne l'endorme, c'est à dire environ deux ou trois heures, il était d'une humeur épouvantable et je devais gérer des crises physiques assez dures ; puis il s'endormait pour trois ou quatre heures, à son réveil, il faisait encore une crise, une sorte de cercle agressif. J'ai eu l'impression au fil des semaines que les neuroleptiques le détruisaient. La solution des psys ? Augmenter les doses. Si vous lisez la liste des effets secondaires c'est effrayant, vous lui faites réellement du mal. Comme l'autiste sévère sous neuroleptiques ne peut plus rien faire et que cela n'est pas une solution, il se fait évidemment éjecter de tout : l'école, le centre, etc. Si vous suivez la voie tracée par les psys pour les autistes sévères, il finira attaché sur un lit d'hôpital psychiatrique.
Toutefois on ne peut pas toujours faire sans neuroleptiques, parfois ils sont nécessaires tant la violence de votre autiste est grande. Toutefois il est important que les médicaments lui fasse du bien et non pas l'inverse. J'ai vu une trentaine de psychiatre et testé une dizaine de médicaments avant de trouver le bon psy et le bon cocktail de médicament. Mais comment reconnaître le bon médicament? (voir notre article)
La solution ? Nous l'avons trouvée après bien des efforts et des échecs : une main de fer dans un gant de velours. (voir notre article) Il faut tenter de lui donner une discipline de vie, par exemple il ne doit pas faire trop d'ordinateur, il faut le lever tous les jours à heure fixe et occuper au moins sa matinée à des travaux avec vous. Il faut s'armer de patience et lui apprendre les choses pas à pas. Le fait pour lui de sentir utile à quelque chose, de participer à la vie de famille, est essentiel pour son équilibre. De plus, votre enfant vous ressent : si vous êtes épuisés, au bord de la crise de nerf, incertains quant à votre couple, si vous lui montrez qu'il risque d'être placé, s'il pense que vous allez l'abandonner, il le ressent, il le sait, et il fera plus de crises violentes. Ce qu'il lui faut, c'est de ressentir une famille solide qui sait où elle va. Nous avons aussi trouvé la solution de la contention (voir notre article) dans un espace sécurisé.
Un autre point aussi est le fait que plus un autiste maîtrise le langage et plus vous éviterez des conflits.
Un autiste qui ne maîtrise pas le langage est frustré de ne pouvoir exprimer ses pensées et ses désirs, c'est pourquoi il est plus facilement enclin à faire des crises de nerf. Pour le langage comme pour le reste, avec un autiste, allez au plus simple : formulez exactement votre demande, exprimez clairement ce que vous ressentez ou ce que vous voulez, exigez qu'il formule des phrases lorsqu'il fait ses demandes, associez des images ou des actions à vos mots ou phrases. Ainsi votre autiste pourra mettre une action, une pensée, un objet, en corrélation avec un mot et apprendra plus facilement le langage.
Il faut également penser à toujours associer votre autiste à chaque situation nouvelle ou quotidienne. Car vous risquez d'avoir des surprises. La dernière en date : je voulais aller m'isoler pour travailler dans un studio indépendant de la maison pendant quelques jours. Erreur, je n'ai pas bien expliqué cela à mon fils qui a fait une série de crises à sa mère. Après avoir discuté, il s'avère que mon fils croyait que nous allions nous séparer. J'étais surpris de constater qu'il comprenait ce genre de choses et ne pas le prendre en compte a provoqué des crises.
La nutrition est importante (mon fils fait plus de crises après avoir mangé une pizza ou une glace). Pour les parents c'est une obligation que l'un des deux soit à la maison pour s'occuper de l'enfant ; rien que le fait de devoir faire à manger un régime sans gluten et sans caséine, cela prend du temps. De plus, il faut occuper votre adolescent autiste au moins quelques heures par jour par des jeux, de l'écriture, de la lecture… Il faut construire un espace sécurisé pour gérer les crises.
Si malgré cela, vous n'arrivez pas à gérer, pensez à Gastiga Villago (voir notre article) ensemble on est toujours plus forts.
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